Le Baiser

John Smith
25/09/2014 – 13/12/2014

Cette nouvelle saison s’intéresse aux usages contemporains de l’image, à l’heure de leur circulation accélérée et de leur séparation rapide de toute source émettrice. Tentant d’en suivre le flux, la reproductibilité, les modes d’apparition, il s’agit de voir comment les images persistent et mutent lors leurs différents passages d’un support à un autre. À travers la question des usages, c’est aussi celle de la subjectivité des rapports aux images qui émerge. La permutation des rôles du producteur-émetteur et du consommateur-récepteur tend à redéfinir la répartition traditionnelle entre l’auteur et le spectateur sur le terrain de l’art. Dans la continuité de la saison précédente consacrée aux “formes des affects”, il s’agira d’interroger la charge affective des images mais également la possibilité de les considérer comme de purs événements, dissociés de toute relation à un sujet, de toute intention comme de toute expérience de perception.

 

Le titre de cette saison, imprononçable dans son intégralité et assez encombrant, peut aussi se dire plus simplement : “ou-la-persistance-des-images” (bien que sa version complète contienne d’autres éléments). D’après sa notation, il s’agit de l’adresse internet d’une image. Seule, choisie au hasard parmi tant d’autres, elle ne représente qu’elle-même. Plus que telle ou telle image, ce titre est ainsi le support d’une image. Il indique donc trois choses à la fois : la persistance des images, une image particulière et un support matériel.

 

La Galerie ouvre cette saison avec la première exposition d’envergure en France du cinéaste britannique John Smith. Après avoir présenté la série des huit films Hotel Diaries (2001 – 07) en septembre 2013, “Le Baiser” réunit un ensemble de dix œuvres, historiques et récentes dont une inédite, au sein desquelles les limites entre documentaire et fiction, entre représentation et abstraction sont ténues. Prenant souvent sa source dans le quotidien de l’artiste qui passe sans transition de son lit à son quartier, son travail vidéo met en jeu l’aspect documentaire de ses images pour les faire glisser sur le terrain de la fiction.

 

Dès la fin des années 1970, John Smith intègre et met simultanément à distance l’approche structuraliste du cinéma expérimental britannique qui use de jeux réglés et répétés, mettant ainsi en évidence les propriétés matérielles du médium et minimisant le contenu narratif des films. Chez lui, forme et contenu ne sont pas dissociables et le plus souvent la fiction, l’improvisation, l’aléatoire déterminent la structure même de ses films dans une exploration à la fois joyeuse et conceptuelle du langage cinématographique. À leur tour, les évolutions technologiques qu’il ne cesse d’intégrer à son propre langage — film, vidéo, image extraite de banques d’images, logiciels de montage, etc. — déterminent la construction narrative de ses films.

 

Dans cette saison à La Galerie, John Smith fait donc figure de parrain auprès d’une génération qui a construit sa culture visuelle dans des usages obscurs d’images instables. Son travail réunit une multitude de pistes de recherches propices à ouvrir cette saison, pistes dont je dressais une liste non exhaustive dans mon mail d’invitation à l’artiste et sur lesquelles il revient dans un entretien mené par la curatrice et critique d’art Émilie Bujès pour ce journal :
. L’importance du contexte — le lieu du tournage, la vie quotidienne — qui confère une dimension autobiographique et ethnographique aux films et mêle les registres de l’intime et du politique dans une forme de microhistoire.
. L’interprétation fictionnelle de l’image documentaire.
. La position non héroïque de l’artiste et du réalisateur, en même temps que l’omniprésence de sa propre voix. L’artiste Lili Reynaud-Dewar décrit cette mise en scène de soi dans un texte pour ce journal.
. Les coïncidences et décalages entre l’image et le langage.
. La réflexion sur le médium et sa dimension matérielle.
. Le rôle du spectateur, tentant de relier activement ce qui est disjoint à l’écran.
. Enfin, la part d’humour qui traverse l’œuvre de Smith fait exploser l’édifice structurel de ses films et témoigne de son souci d’embarquer presque physiquement le spectateur dans son cheminement, sans jamais perdre de vue la dimension réflexive de son cinéma.

 

Le titre de l’exposition, “Le Baiser”, est emprunté à l’une de ses vidéos. C’est également une invitation faite au spectateur à se plonger dans les salles sombres, isolées et dans lesquelles l’image projetée constitue le seul point lumineux, pour 116 minutes d’immersion.

 

Émilie Renard

Autour de l’exposition

  • 27/09/2014

    de 18h à 21 h

    La Galerie a 15 ans !
    Évènements en continu

  • 27/09/2014

    Samedis créatifs

    de 14h30 à 16h

    Pour les 6-12 ans

    Gratuits, sur inscription

  • 27/09/2014

    Samedis créatifs

    de 16h30 à 17h15
    Pour les 4-5 ans

    Gratuits, sur inscription

  • 01/10/2014

    Tous les mercredis
    de 16h à 17h30 : I LOL ART

    Ateliers pour les 13-15 ans

    Gratuits, sur inscription

  • 29/11/2014

    de 17h à 19h

    John Smith en live
    Table ronde avec John Smith, Émilie Bujès, Jean-Pierre Rehm et Lili Reynaud-Dewar.


    En anglais, traduit en français

  • 06/12/2014

    de 14h à 19h

    Parcours Est #18. Galerie 22,48m2 (75020), Espace Khiasma (Les Lilas), La Galerie (Noisy-le-Sec).

    Gratuit (sauf titre transport) sur réservation : resa@parcours-est.com